Chronologie comparée – Final Fantasy XIII

Note : cet article met en relation l’histoire de Final Fantasy XIII avec le texte du mythe Fabula Nova Crystallis, que vous pouvez lire sur cette page. Afin de lier les deux sources et de dissiper certaines zones d’ombre que cela peut provoquer, le texte qui va suivre contient quelques éléments spéculatifs.

Comme les précédents Final Fantasy, FFXIII débute au niveau humain et s’élève lentement jusqu’au niveau mythologique, laissant le joueur participer à une aventure si intense qu’elle décide du sort du monde. C’est pour revenir aux racines de la série tout en renforçant l’importance de l’univers que les développeurs du treizième épisode ont décidé de créer Fabula Nova Crystallis, la nouvelle histoire du cristal. A l’origine, ce mythe est indépendant de tout jeu. Il a été écrit pour servir de base à la conception de l’univers des Final Fantasy portant le numéro XIII (depuis le changement de nom de Type-0, Fabula Nova Crystallis est un projet sans nombre associé). Pour la première fois dans l’histoire de la série, il existe donc une source supérieure au jeu, que l’on ne retrouve pas à l’intérieur de celui-ci mais qui l’influence en profondeur dans ses aspects les plus fondamentaux. Les enjeux de FFXIII sont aisément compréhensibles lors du scénario, mais pour aller un peu plus loin et cerner les motivations réelles des fal’Cie, le texte du mythe Fabula Nova Crystallis devient un précieux allié.

Un allié dont, pourtant, il faut savoir se méfier. Fabula Nova Crystallis n’est pas le « prologue » de FFXIII, ce dernier prenant soin d’adapter les éléments du récit pour clarifier ou différencier son histoire. Par exemple, là où le mythe considère Pulse, Lindzei et Etro comme des fal’Cie créés par le dieu Bhunivelze, le jeu les voit tous les quatre comme des dieux. Cela crée une hiérarchie plus claire entre les entités et les êtres qui existent dans cet univers : les dieux sont au sommet, suivis par les fal’Cie et, au bas de l’échelle, par les l’Cie. Il n’en reste pas moins que certains éléments obscurs de l’histoire sont mieux compréhensibles à la lumière du mythe et que, donc, il devient très utile d’associer les deux.

Aux sources du mythe
Les origines des mortels
– Encadré : le mystère de la tour de Taejin
Le « grand dessein »
Le coup de grâce viendra de Pulse
Une idée née de la guerre
Cinq siècles d’attente
– Encadré : qui est le « Créateur » ?
Dernières questions

Aux sources du mythe

Le mythe Fabula Nova Crystallis nous apprend que le dieu Bhunivelze, cherchant à devenir le souverain incontesté du monde visible, essaya d’assassiner sa propre mère, Mwynn. Celle-ci fuit dans le monde invisible, inaccessible pour son fils. Le monde visible commença alors à être lentement rongé par le chaos, ce qui mena Bhunivelze à penser que Mwynn avait lancé sur lui une malédiction. C’est pour essayer d’y mettre fin qu’il créa Pulse, Etro et Lindzei, des divinités censées l’aider à découvrir la porte des âmes, seul moyen d’accéder au monde invisible et ainsi de régler ses comptes avec sa mère. Cette histoire est absente de FFXIII : dans la première entrée du menu Extraits, le jeu explique uniquement qu’un des dieux, dit le Lumineux, assiste impuissant au naufrage du monde dans le chaos. Etant donné la représentation de Bhunivelze dans la vidéo racontant le mythe, il n’y a aucun doute sur le fait qu’il s’agit du Lumineux, mais son nom n’est jamais mentionné dans le jeu. La traque qu’il lance, en revanche, est l’origine même de tout ce qui est raconté dans FFXIII.


Gran Pulse (illustration : Isamu Kamikokuryô)

Conformément au mythe, ce serait en effet Bhunivelze qui aurait initié la recherche de la porte des âmes. Mais FFXIII n’établit pas de supériorité entre lui et les trois dieux, donc il est difficile d’affirmer que dans le jeu, il est bien leur créateur. La première entrée des Extraits raconte simplement les réactions de ces dieux qui ont totalement disparu à l’époque du jeu : Pulse façonne une terre qui plus tard portera son nom, Lindzei se plonge dans une profonde réflexion et Etro disparaît dans le monde invisible. Dans le jeu autant que dans le mythe, Etro est décrite comme une divinité impuissante et insensée, attirée seulement par le néant. De leur côté, les deux dieux qui se lancent dans la quête de Bhunivelze, Pulse et Lindzei, le font chacun à leur manière. Après avoir modelé une terre palpable, Pulse crée de nombreux fal’Cie qui se mettent à explorer manuellement chaque recoin du monde : ciel, surface et souterrains. Lindzei, personnage manifestement plus intelligent que Pulse, cherche de son côté un moyen d’ouvrir directement la porte des âmes au lieu de la chercher sans réel indice sur son existence.

Le mythe explique que Bhunivelze, avant de sombrer dans un sommeil cristallin, a chargé Lindzei de le réveiller le jour où la porte des âmes serait découverte. Contrairement à Pulse, Lindzei se trouve donc investi de deux missions, ouvrir la porte des âmes et en avertir Bhunivelze. La résolution de ce problème vient d’un autre acteur crucial du mythe : l’humanité.

Les origines des mortels

La naissance de l’humanité est clairement expliquée dans le mythe, bien moins clairement dans le jeu. Selon Fabula Nova Crystallis, l’humanité est née spontanément du sang d’Etro, qui s’est mutilée pour rejoindre Mwynn dans le monde invisible, et les humains sont des créatures uniquement destinées à mourir. Comme s’ils étaient inévitablement attirés vers la déesse, c’est précisément au moment de leur mort qu’ils la retrouvent dans le monde invisible. Ce monde est lui aussi sujet à la malédiction : au moment de son arrivée, Etro y trouva Mwynn dévorée par le chaos. Malgré la gravité de la situation, elle sembla sourde à ses dernières paroles. Pourtant, prise de compassion pour les humains qui se pressaient aux portes du monde invisible à leur mort, Etro prit l’initiative de placer de petites portions du chaos dans leurs cœurs, ce qui rétablit pendant un temps au moins l’équilibre des deux mondes. Le mythe explique que l’expansion du chaos n’est pas une malédiction lancée par Mwynn, celle-ci en étant elle-même victime. Il ne s’agirait en effet que du destin, triste réalité face à laquelle les dieux semblent bien impuissants.


La tour de Taejin (illustration : Toshitaka Matsuda)

Dans FFXIII, la naissance de l’humanité est attribuée à Pulse et/ou Lindzei, qui auraient utilisé pour cela les restes de la déesse disparue. Conformément au mythe, cette déesse disparue est sans doute possible Etro. Mais le rôle des deux autres dieux dans la création des humains est très flou : le mythe raconte que ces derniers considèrent Pulse comme leur seigneur et Lindzei leur protecteur, jamais comme leurs géniteurs. Dans le jeu, les pulsiens voient au contraire Lindzei comme un dieu maléfique dès qu’il entame la construction de Cocoon. Etrangement, c’est bien Lindzei qui trouve en l’humanité la ressource la plus utile à l’élaboration du plan de Bhunivelze. Les hommes entretiennent une relation directe avec le monde invisible, où Etro les accueille, mais celle-ci semble à l’origine curieusement détachée de ces créatures descendant pourtant de son sang. De ce fait, il n’est pas impossible que Lindzei soit seul à l’origine de l’humanité : en découvrant les restes sanglants d’Etro, peut-être a-t-il décelé en eux la même capacité à franchir la porte de l’au-delà, un au-delà qui est précisément l’objectif de sa quête.

Qu’il l’ait encouragée ou non, c’est en se basant sur cette réalité que Lindzei a compris qu’il est possible de déployer une porte des âmes extrêmement large en entraînant la mort d’un nombre immense d’humains au même instant. A ce moment-là, l’accès au monde invisible serait si ample que Bhunivelze, réveillé, pourrait y pénétrer avec ses armées et anéantir la source présumée de la malédiction. Mais comment tuer un grand nombre d’humains en très peu de temps ? Cocoon est la solution à cette énigme, une solution que seul FFXIII mentionne car il s’agit de l’élément central de son histoire, qui le détache du mythe.

Le mystère de la tour de Taejin

L’un des édifices les plus mystérieux de FFXIII est sans conteste Taejin, une immense tour brisée en deux qui permet d’atteindre les terres du nord. Selon la description du jeu, la tour a été construite dans des temps anciens, très probablement avant même la fondation de Cocoon, mais rien n’indique quel était son usage. L’observation des ruines de la tour permet néanmoins de formuler quelques hypothèses.

Le sommet, visible à l’horizon où il est tombé, est composé de plusieurs crochets légèrement rétractés qui donnent l’impression d’avoir un jour soutenu un objet de grande taille… Cocoon ? La tour de Taejin serait-elle donc le socle sur lequel Lindzei aurait créé son cocon et « l’ascenseur » par lequel les humains y seraient monté ? Le jour où Orphan aurait commencé à alimenter le cocon en énergie, celui-ci aurait pu s’arracher à la tour qui le portait, la précipitant au sol. Et Cocoon, justement, se trouve dans la direction de la chute de la tour…
Tout ceci, malheureusement, n’est que spéculations.

Le « grand dessein »

Si Pulse et Lindzei obéissent tous les deux à Bhunivelze et cherchent la porte des âmes, ils ne le font pas de la même façon. Pulse, dit le Puissant, lance les fal’Cie de sa création dans une recherche sommaire, qui consiste simplement à fouiller sans relâche chaque recoin du monde visible. La présence d’humains a permis à ces fal’Cie de créer des l’Cie, entités inférieures bien que dotées d’un temps limité et de pouvoirs renforcés pour accomplir une Tâche. Mais les fal’Cie et les l’Cie n’ont jamais réussi à découvrir le portail tant convoité : dénués de la finesse d’esprit des fal’Cie de Lindzei, les créations de Pulse ne comprennent pas que la porte des âmes est une ouverture informelle et impalpable vers l’au-delà. Qu’ils survolent l’intégralité de Gran Pulse, qu’ils arpentent chacun de ses chemins ou qu’ils creusent au plus profond de son écorce, ils ne la trouveront jamais. L’ayant compris, Lindzei décide de fonder Cocoon, une masse de terre géante qu’il conçoit comme une couveuse capable de faire prospérer l’humanité jusqu’à ce que leur sacrifice soit assez massif pour accomplir sa mission.


Cocoon vu depuis Gran Pulse (illustration : Isamu Kamikokuryô)

C’est la naissance du « grand dessein », un projet que Lindzei a confié aux fal’Cie de sa création, qui sont plusieurs millions. Tous ont pour mission de faire de Cocoon un lieu paradisiaque où les humains vivent en paix, hors de portée de la menace posée par Gran Pulse. Aucun d’eux n’est transformé en l’Cie et les fal’Cie se plient même en quatre pour subvenir à chacun de leurs besoins. Les instructions données par Lindzei, en définitive, empêchent les fal’Cie de Cocoon de faire le moindre mal aux humains. Ainsi Orphan, source d’énergie maintenant le satellite en lévitation, ne peut pas être l’artisan de la destruction, quand bien même son suicide suffirait à provoquer la chute de Cocoon. Eden assure de son côté l’équilibre de la société humaine. Impossible pour lui de laisser la confusion s’emparer de la population. En réalité, des trois grands fal’Cie de Cocoon, c’est Barthandelus qui est chargé de mettre en place les éléments du cataclysme. L’une des inscriptions de son corps mécanique est même « purveyor of the greater plan », exécuteur du grand dessein.

Naturellement, Barthandelus n’est pas capable non plus de procéder lui-même à la destruction de Cocoon. Il lui faut donc réfléchir à un moyen de forcer une autre entité à le faire à sa place. Réflexion qu’il doit accomplir seul, son créateur ayant disparu : aussi étonnant que cela puisse paraître, Lindzei et Pulse ont en effet quitté Cocoon et Gran Pulse peu de temps après leurs fondations, et ce sans aucune explication…

Le coup de grâce viendra de Pulse

Chez les humains, la construction de Cocoon a entraîné une opposition forte avec Gran Pulse. La tension s’est amplifiée pendant plusieurs siècles, avant que la guerre n’éclate finalement, environ 600 ans avant le début du jeu. Les motifs de la Guerre de Transgression ne sont pas expliqués dans FFXIII, si bien qu’on peut se demander s’ils sont censés rester mystérieux ou s’ils doivent être implicites. Une chose est claire, cependant : les humains de Gran Pulse, furieux que Lindzei ose profaner la terre de leur seigneur Pulse, n’ont pas digéré le départ de certains d’entre eux vers Cocoon. Dès lors, ils se sont juré de détruire un jour le cocon des hérétiques. Les descriptions données par le jeu sont rapportées par des hommes, donc il est impossible de savoir pourquoi les fal’Cie eux aussi ont choisi de prendre part au conflit. En effet, c’est bien un fal’Cie de Pulse, Anima, qui confie la Tâche à Fang et Vanille de se transformer en Ragnarok pour détruire Cocoon. En supposant qu’il ignore le plan de Lindzei, quelle raison aurait-il à s’en prendre aux fal’Cie de Cocoon alors qu’ils partagent tous la même quête ?


Le village d’Oerba sur Gran Pulse (illustration : Isamu Kamikokuryô)

Peut-être existe-t-il une compétition entre Pulse et Lindzei : tous deux ayant pour mission de retrouver la porte des âmes, ils se seraient lancés dans une course qui, peu à peu, aurait entraîné entre eux de la méfiance, chacun espérant être le premier à accomplir la mission confiée par Bhunivelze. Cette tension se serait transmise aux fal’Cie et aux humains de chaque monde qui, même en l’absence des dieux, auraient continué à entretenir les dissensions au point de les laisser culminer en un conflit armé. Le jeu explique qui plus est que les fal’Cie de Gran Pulse cherchent par tous les moyens à faire plaisir à leur créateur, Pulse. La tension entre les deux dieux a pu être exacerbée par le fait que, selon le mythe, c’est à Lindzei que Bhunivelze a confié le soin de le protéger et de le réveiller le jour venu. Pulse, moins intelligent, aurait-il été jaloux de Lindzei et aurait-il ainsi été prêt à anéantir ses chances de réussite ? Ironiquement, que ce soit par l’aboutissement du grand dessein ou par la vengeance venue de Pulse, toute destruction de Cocoon marquerait la victoire de Lindzei.

Dans FFXIII, toute l’histoire part du principe que Pulse et Cocoon sont des mondes qui s’opposent, et cela s’intègre dans l’histoire sans incohérence notable : il n’y a rien de choquant à ce que les fal’Cie s’affrontent eux aussi. Barthandelus a lui-même pu exacerber les tensions en provoquant directement les fal’Cie adverses. C’est uniquement quand on commence à réfléchir au lien avec le mythe qu’on trouve des zones d’ombre dans les vraies racines du conflit.

Une idée née de la guerre

La Guerre de Transgression est un épisode décisif de l’histoire de Gran Pulse et Cocoon. C’est à ce moment-là que le déclin de Pulse a débuté, suite à la défaite de ses armées. Grâce à sa victoire, le gouvernement sacré de Cocoon voit de son côté son autorité consolidée. Mais l’événement le plus crucial du conflit est bien sûr l’attaque de Ragnarok, gigantesque créature mythique dont la Tâche est de tuer Orphan pour entraîner la destruction totale de Cocoon. Même s’il n’a pas réussi à accomplir cette mission, coupé dans son élan par Etro, Barthandelus a découvert en lui l’entité parfaite pour mener à bien le grand dessein : aucun fal’Cie ou l’Cie de Cocoon ne pouvant porter atteinte à son monde, c’est donc bien vers les êtres de Gran Pulse qu’il doit se tourner. Afin de forcer le destin, Barthandelus rapatrie à l’intérieur de Cocoon le vestige dans lequel sont enfermés Anima endormi et ses l’Cie cristallisés Fang et Vanille, en espérant qu’ils se réveillent un jour et accomplissent leur Tâche pour de bon. Ce déplacement accompagne une collecte massive de matériaux sur Gran Pulse, visant à construire de nouvelles zones habitables remplaçant celles endommagées par l’impact de Ragnarok.


La Cinquième arche à l’intérieur de Cocoon (illustration : Isamu Kamikokuryô)

L’intervention d’Etro au paroxysme de la Guerre de Transgression est un événement notable lui aussi, quand on considère que la déesse de la mort ne s’est plus manifestée dans l’histoire depuis sa disparition dans le monde invisible, avant même la création de Cocoon. Divinité en apparence désintéressée, elle décide pourtant d’empêcher la destruction de Cocoon, éprise de compassion selon le jeu pour l’humanité issue de ses restes. Même depuis le monde invisible, elle veille certainement sur le visible : elle vient notamment en aide aux l’Cie en proie au désespoir, en leur offrant des eidolons pour leur redonner courage. Mais en arrêtant Ragnarok, n’essaie-t-elle pas aussi de défendre son monde de résidence ? Gardienne de la porte des âmes, elle a sans doute été prise de panique en devinant ce cataclysme qui allait entraîner des millions de morts et ainsi permettre à toute divinité située dans le monde visible de lancer l’assaut contre elle. Précisément, Etro a toutes les raisons de craindre un tel événement.

Car les intentions de Bhunivelze et des autres dieux à leur entrée dans le monde invisible sont claires : l’existence des Arches est la preuve même de la guerre qu’ils envisagent d’y lancer. Selon FFXIII, les Arches ont été construites bien avant l’apparition de Cocoon, ce qui signifie que ce sont les arsenaux d’une guerre future avec « l’au-delà ». Le mythe permet de comprendre les motifs de cette guerre, autrement dit l’anéantissement de Mwynn (dont Bhunivelze ignore la mort) afin de mettre un terme au chaos rongeant le monde visible (une autre erreur de Bhunivelze, le chaos dévorant aussi le monde invisible).

Cinq siècles d’attente

Le vestige d’Anima placé près du nouveau village de Bodhum, Barthandelus n’a plus qu’à attendre le réveil de ses captifs. Une attente de plus de 500 ans, pendant laquelle l’humanité disparaît totalement de Gran Pulse, rongée par ses guerres intestines et maudite par les Tâches insensées de leur fal’Cie. Pourtant, même si Gran Pulse redevient une terre livrée à la nature sauvage, le Sanctum continue de brandir la peur de l’autre monde à l’intérieur de Cocoon, si bien que ses habitants ignorent le sort réservé à leurs ennemis. Le jour venu, Barthandelus pourrait, en évoquant simplement le nom d’un l’Cie de Pulse, terroriser chacun des millions d’habitants de Cocoon et déclencher une colère si immense qu’elle conduirait sans nul doute le l’Cie acculé à résister et à se battre jusqu’au bout pour accomplir sa Tâche. L’exécuteur du grand dessein est même prêt à ouvrir les portes des Arches qu’il a déplacé dans Cocoon pour entamer le sacrifice et contraindre tout l’Cie réfractaire à un dilemme douloureux : laisser les armes des Arches décimer la population dans une agonie lente et pénible, ou tenter le tout pour le tout en abattant directement Orphan dans l’espace interdimensionnel où il réside.


Eden, capitale administrative de Cocoon (illustration : Yuki Matsuzawa)

Le jour où Anima transforme le groupe mené par Lightning en l’Cie, les personnages ont la vision de Ragnarok détruisant Cocoon, comme Fang et Vanille quelques siècles plus tôt. Mais eux, élevés à l’intérieur du cocon, ne peuvent concevoir une telle catastrophe. Barthandelus adopte alors une attitude distante : il les surveille grâce à son rokh, que l’on voit parfois voler au-dessus des lieux qu’ils traversent, les laissant accepter leur destin et gagner en détermination. Leur rage les mène droit devant le fal’Cie, qui choisit de leur expliquer la véritable teneur de leur Tâche avant de les enfermer dans la 5e Arche pour renforcer plus encore leurs pouvoirs. Alors qu’ils errent dans l’Arche, Cid leur révèle la vraie mission des fal’Cie de Cocoon : le rappel des dieux disparus, au prix du sacrifice de tous les humains vivant à l’intérieur du paradis artificiel. Après une errance sous tension sur Gran Pulse, le groupe de personnages revient finalement sur Cocoon, provoqué par Barthandelus qui a ouvert les Arches. Les l’Cie n’ayant plus d’autre choix, ils doivent agir vite pour accomplir la moins cauchemardesque des solutions.

Au moment décisif, Fang se transforme une fois encore en Ragnarok, mais abandonne sa Tâche pour redevenir humaine. Car c’est bien en tant qu’humains, et non que l’Cie, que les personnages décident d’agir ensemble pour abattre Orphan. Après une longue et difficile réflexion, ils choisissent de libérer l’humanité de ce fal’Cie suicidaire : quelle que soit l’issue du combat, tous ceux qui survivront à la catastrophe n’auront plus les mains liées.

Qui est le « Créateur » ?

Lorsque les l’Cie rencontrent Cid à l’intérieur de la Cinquième arche, il leur explique que les fal’Cie cherchent à rappeler un « Créateur » unique (en anglais, Maker). En choisissant ce terme, les versions occidentales étoffent ce qui dans le texte japonais était pourtant assez vague : Cid ne parle en effet que d’un « dieu » imprécis qu’il ne nomme pas (sans compter qu’il peut très bien s’agir de « dieux » au pluriel, le japonais faisant rarement la distinction). Utiliser le mot Créateur alors qu’il n’était pas là à l’origine donne le sentiment qu’on peut identifier cette entité, or le mythe prouve que ce n’est pas aussi simple que cela. En poursuivant l’histoire du jeu, on peut comprendre qu’il s’agit de Lindzei, effectivement créateur des fal’Cie de Cocoon.

L’affirmation est néanmoins ébranlée par le fait que Pulse est décrit comme le créateur du monde dans les Extraits. Le mythe Fabula Nova Crystallis brouille encore plus les pistes, puisqu’il y ajoute Bhunivelze, lui créateur de Pulse et Lindzei. Il est donc dangereux pour les traducteurs du jeu d’affirmer ce mot de Créateur, d’autant plus quand il est ajouté par rapport au texte japonais. En l’absence d’éléments concrets sur celui ou ceux que les fal’Cie veulent rappeler auprès d’eux, rester vague aurait été une option plus sage…

Dernières questions

Les Extraits que l’on peut lire dans FFXIII, textes rédigés par des habitants de Gran Pulse dans les temps passés, posent un certain nombre de questions mais le reste du jeu n’y apporte que des réponses ténues. L’Extrait XI s’interroge ainsi sur la finalité des fal’Cie qui arpentent sans relâche Gran Pulse. Son auteur a bien compris qu’il ne s’agit pas d’une expansion aléatoire, mais bien d’une quête. Ces fal’Cie agissent-ils ainsi pour rejoindre les dieux disparus ou pour les rappeler auprès d’eux ? Contrairement à Lightning et à ses compagnons, l’humain anonyme qui se pose cette question n’a pas pu recevoir la réponse de la bouche de Barthandelus : les fal’Cie de Pulse et de Cocoon cherchent à rappeler les dieux créateurs auprès d’eux. Le mythe Fabula Nova Crystallis est le seul moyen de comprendre pourquoi les fal’Cie veulent découvrir la porte des dieux, même si l’Extrait XII frôle de très près l’explication.


La dernière scène du jeu (illustration : Isamu Kamikokuryô)

Naturellement, ces questions sur le lien entretenu par les fal’Cie et les dieux en impliquent d’autres. Pourquoi les dieux ont-ils disparu ? Bhunivelze a sombré dans le sommeil le premier, suivi de Pulse et Lindzei une fois leurs créations respectives mises en place. C’est sans doute parce qu’ils ont réussi à confier leurs missions à des fal’Cie qu’ils peuvent se retirer, attendant le jour de la découverte de la porte des âmes. Les fal’Cie sont des êtres conçus pour accomplir une seule et unique Tâche, dont ils ne peuvent jamais dévier et contre laquelle ils ne peuvent en aucun cas se dresser. Les humains sont plus incertains, mais avec des fal’Cie bien organisés, il est facile de les tenir en laisse. Aussi bienveillants qu’ils en ont l’air, les fal’Cie de Cocoon n’ont en fin de compte aucune pitié pour l’humanité et ils ne veillent sur elle que parce que leurs Tâches les y obligent…
Il existe néanmoins une autre réponse possible à cette question : en créant Orphan, porteur de tout Cocoon, Lindzei a voulu qu’il soit comme son nom l’indique un orphelin, n’ayant pour simple désir que de retrouver son géniteur. Ainsi, en quittant totalement Cocoon, Lindzei inspirait-il chez Orphan le seul souhait de le rappeler, garantie qu’un jour sa mission s’accomplirait.

L’Extrait X, consacré à la raison derrière l’existence des Arches, se demande enfin si les dieux disparus se trouvent désormais dans le monde invisible, désigné sous le terme d’au-delà. La réponse est très certainement non. Ni le mythe, ni le jeu n’indiquent où se trouvent Bhunivelze, Pulse et Lindzei, mais il est clair que seule Etro réside dans le monde invisible. C’est bien ce que sous-entend l’Extrait XIII, qui prophétise d’ailleurs le sacrifice des habitants de Cocoon. Fabula Nova Crystallis expliquant que les dieux ont envoyé leurs fal’Cie à la recherche de la porte des âmes pour atteindre le monde invisible, preuve est faite qu’ils existent bien quelque part dans le monde visible. Gran Pulse ne serait donc qu’une partie de ce monde et les dieux disparus vivraient ailleurs, certainement endormis, en attendant le jour où leurs serviteurs accompliraient leur mission…