Éditorial : la blague a assez duré

Samedi, lors de la généreuse cérémonie d’ouverture de la PlayStation Experience, Square Enix a plombé l’ambiance. Shinji Hashimoto, le grand gestionnaire de Final Fantasy, a déchaîné les acclamations de la salle en montrant simplement le logo de Final Fantasy VII, et puis… Rien. Un simple portage sur PS4 de la nouvelle version PC du jeu. Une annonce qui n’aurait mérité rien de plus qu’un communiqué de presse, un mois avant la sortie. Qu’y a-t-il dans la tête de Hashimoto ? Est-il simplement naïf, ou alors proprement machiavélique ?

Je l’ai déjà écrit : je suis contre la conception d’un remake de FFVII. Pas seulement parce que je pense que Square Enix doit mobiliser sa main-d’œuvre sur de nouveaux jeux avant tout, mais aussi parce qu’un tel projet demanderait de nombreux ajustements qui seraient de toute façon sujets à polémique. Dans ces conditions, mieux vaut conserver le jeu d’origine, idée qui rend d’ailleurs la démarche de ce portage plutôt légitime, si l’on oublie son annonce grandiloquente déplacée. Et sous sa forme originale, FFVII est de toute façon toujours aussi bon. Je l’ai refait une fois de plus cet été, sur PS Vita, et j’ai été étonné par la fraîcheur qu’il dégage encore. Un léger dépoussiérage de ses graphismes en 2D et une nouvelle traduction sont les seules choses que je lui accorderais volontiers. Le reste est toujours aussi formidable et confirme mon sentiment qu’un remake n’est vraiment pas nécessaire.

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Mais que l’on soit soulagé ou enragé de voir que ce Final Fantasy VII sur PS4 ne sera qu’un portage de la version PC, il y a une chose sur laquelle on peut se rejoindre : jouer avec les nerfs des joueurs n’est vraiment pas sain. Depuis le temps que la presse et les fans parlent de ce sujet brûlant, Shinji Hashimoto ne peut pas ignorer que la moindre évocation du septième épisode peut déchaîner les passions. Surtout quand il annonce d’une manière aussi théâtrale ce qui n’est qu’un portage de plus. L’éditeur n’avait-il pas sous la main un petit clip inédit de Final Fantasy XV à montrer, ne serait-ce que de la démo jouable ? Ou bien une image ou une illustration de Kingdom Hearts III ? Quelque chose tiré de l’avenir, qui puisse entretenir l’enthousiasme de ces titres futurs ? Non, il a préféré jouer avec le feu et transformer ce qui aurait pu être un hommage à cet épisode si intimement lié au succès de la PlayStation en un haut-le-cœur gratuit et cynique.

À une époque où les développeurs des Final Fantasy actuels consacrent plus de temps que jamais à communiquer avec les fans pour partager les dernières nouvelles des jeux ou répondre à leurs inquiétudes (les lettres live de FFXIV ou le Tabata’s Active Time Report pour FFXV), ce qui s’est passé à la PlayStation Experience apparaît comme une maladresse gigantesque et un retour en arrière brutal. C’est d’autant plus un problème que cela s’est passé devant les yeux de plusieurs dizaines de milliers de joueurs de toute la sphère PlayStation, là où les émissions de Naoki Yoshida et Hajime Tabata ne parlent qu’à un public restreint de passionnés qui sont prêts à leur consacrer une ou deux heures. Pour être pertinente et ne pas tourner en ridicule l’intégralité de la société, la communication généraliste de Square Enix devrait être plus proche de cet esprit. Surtout que ce n’est pas Hashimoto lui-même qui va devoir contenir l’agacement des fans sur les réseaux sociaux, endroit où les tempéraments sont déjà suffisamment à fleur de peau.

Provocation déplacée de Hashimoto mise à part, je pense tout de même que si toute l’énergie déployée à haïr ce portage insignifiant était utilisée pour s’intéresser pleinement à tous les Final Fantasy qui ont suivi le VII, le monde s’en porterait mieux. Tant d’épisodes négligés pour des prétextes parfois fallacieux, et qui mériteraient de recevoir une pareille attention…

Alors assez de Final Fantasy VII. Assez.