Square Enix acte la fin de Luminous Productions, créateurs de Forspoken

Le clap de fin approche pour Luminous Productions, cinq ans après sa fondation à partir de l’ex-équipe de Final Fantasy XV et, surtout, quelques semaines seulement après le lancement de son premier jeu : Forspoken, sur PlayStation 5. Par un communiqué, Square Enix vient en effet d’annoncer que le studio sera fusionné dans sa maison mère japonaise à compter du 1er mai prochain, dans un mouvement qui redistribuera probablement ses effectifs sur les projets en gestation dans les unités créatives principales de l’éditeur.

Tout juste les développeurs vont-ils mener à bien une grande mise à jour corrective récemment promise, puis l’unique contenu téléchargeable In Tanta We Trust (prévu pour cet été), comme ils l’ont annoncé sur leur compte Twitter.

Forspoken_DemoAnnounceTrailer_Still_01

Transformation de l’ex-Business Division 2 de Hajime Tabata, Luminous Productions avait été établi en 2018 en tant que filiale du groupe Square Enix, installée exactement dans les mêmes locaux de Tokyo, mais avec une identité propre et – semble-t-il – une certaine initiative en termes créatifs. Son objectif était de travailler sur une nouvelle licence majeure de l’éditeur, le titre depuis devenu Forspoken (longtemps connu en interne sous le nom de code Witch). À l’instar de FFXV, l’équipe comptait produire non seulement un jeu, mais une véritable galaxie multimédia de grande ampleur. L’ambition s’est néanmoins peu à peu évanouie, à tel point qu’il n’est plus resté que le titre de base, qui a lui-même grandement muté au fur et à mesure de sa conception, les créateurs ayant mis beaucoup de temps à décider de leur direction.

Il est difficile de savoir ce qui a entravé le succès de cette entreprise, mais il est certain que le départ précoce du charismatique Tabata (quoi qu’on pense de lui) a laissé un vide dans la gouvernance du studio, vide que son successeur Takeshi Aramaki, un technicien bien plus qu’un chef d’équipe, n’a pas su combler. De même, Luminous Productions n’a semble-t-il pas réussi à recruter à la hauteur de ses ambitions, les effectifs n’arrivant jamais à atteindre les 200 têtes (ils sont actuellement 170, selon leur site Internet), ce qui est beaucoup trop peu pour espérer développer un AAA capable de titiller les mondes ouverts internationaux.

En guise de compensation, Forspoken a donc été conçu avec de très nombreux sous-traitants, un choix qui avait déjà affecté FFXV en son temps (la section finale à bord du train avait été très largement confiée à la société taïwanaise XPEC Entertainment).

Résultat : Forspoken a été accueilli fraîchement par la critique, qui y a vu un jeu certainement bon sur de nombreux points, mais clairement inabouti sur d’autres. À cela s’est ajouté le fait qu’il est devenu le souffre-douleur des réseaux sociaux y compris avant son lancement, prétendument pour cause d’écriture médiocre. Mais beaucoup de jeux peuvent se targuer d’une telle « qualité », y compris des grosses productions, et il est difficile d’exclure que d’autres critères, plus sordides, aient été à la source de ce triste spectacle. Si les ventes du jeu ne sont pas encore connues, il y a fort à parier que le P.-D.G. Yôsuke Matsuda abattra la carte classique des « résultats inférieurs aux objectifs espérés » et s’en lavera les mains.

Luminous Productions n’en reste pas moins une équipe de programmeurs et concepteurs très compétents, assis sur une technologie solide : le moteur Luminous Engine, qui a longuement mûri depuis ses débuts il y a une dizaine d’années, puis son inauguration avec FFXV et son perfectionnement pour Forspoken. À ce titre, le communiqué de Square Enix est plutôt clair : la réintégration des effectifs de Luminous Productions au sein de la maison est avant tout destinée à « consolider les prouesses concurrentielles des studios de développement du groupe ». Reste maintenant à savoir quels futurs titres pour consoles et PC bénéficieront de l’expérience de ces vétérans, mais nous pouvons tirer de cette nouvelle au moins un bon espoir : si embourbé soit-il dans le funeste business de la blockchain, l’éditeur est bel et bien déterminé à continuer à créer des expériences à la pointe de la technologie.