Final Fantasy XIV, le triomphe de longue haleine

Naoki Yoshida l’avait souligné peu avant son lancement : Endwalker est, à ce jour, l’extension la plus massive de l’histoire de Final Fantasy XIV, d’où son report inattendu de dernière minute, en vue de procéder aux ultimes ajustements. Force est de constater qu’il n’a pas menti. Par son exécution implacable et sa vertigineuse conclusion, ce nouveau chapitre marque l’apothéose de l’épopée de FFXIV autant que le triomphe d’un jeu revenu du pire, après l’échec de sa première version et sa résurrection en urgence il y a une dizaine d’années.

00 FFXIV logo

Maintenant que s’est conclu ce premier grand cycle, dit d’Hydaelyn et Zordiarche, l’heure est propice pour un retour sur le chemin parcouru. Ce qui va suivre n’est pas un test, ni de FFXIV et de ses précédentes extensions, ni d’Endwalker, mais une plongée admirative et nostalgique dans ce qui a fait de ce jeu une histoire aussi mémorable, désormais inscrite parmi les plus grandes heures de Final Fantasy.

Cet article a été écrit dans l’idée d’éviter les spoilers. La dernière partie, consacrée spécifiquement à Endwalker, aborde néanmoins les thématiques de l’extension. Il peut donc être préférable de ne pas la lire avant d’avoir terminé l’épopée, à l’exception des deux derniers paragraphes qui constituent une conclusion générale.

Le choix de l’histoire et de l’univers

Au premier abord, et surtout si longtemps après sa mise en service, il est certain que FFXIV n’a pas toutes les chances de son côté. C’est un titre vieillissant, bien loin de l’époustouflante débauche audiovisuelle d’un FFVII Remake, mais tel est le lot des jeux en ligne qui durent. Après le fiasco bien connu de la première version, il a dû être développé à toute vitesse sur la base de mécaniques prévisibles et éprouvées, notamment tirées de l’exemple World of Warcraft, sans avoir le temps d’y ajouter une touche personnelle. De plus, il devait tourner sur PlayStation 3, machine alors en fin de cycle. Quand bien même il l’a abandonnée il y a quelques années, FFXIV porte toujours les stigmates de cette première époque, dont une base technologique limitée qui restreint forcément l’évolution de ses mécaniques ou de ses graphismes.

Y compris Endwalker n’introduit que de menues nouveautés, dont certaines – à commencer par la mécanique de suivi des PNJ – semblent sortir d’une autre époque. Mais le calendrier de lancement des mises à jour majeures (tous les quatre à cinq mois) et des extensions (tous les deux ans) n’offre que peu de latitude aux développeurs pour accompagner les progrès matériels, ce qui les pousse à se contenter d’une formule basique, bien qu’indéniablement efficace. Enfin, toujours dans les points négatifs, il serait difficile de ne pas souligner que la somme des contenus de FFXIV est désormais si grande qu’elle est certainement intimidante pour les nouveaux venus – inconvénient récurrent des MMORPG ayant déjà de nombreuses années à leur compteur.

Il en faudrait bien plus, cependant, pour empêcher FFXIV de trôner aujourd’hui sur son petit nuage, aimé et célébré par une communauté de plusieurs millions de personnes parmi les plus passionnées et bienveillantes de toute l’industrie. C’est que son âme est ailleurs, là où se situe au passage celle de la série tout entière : une histoire, des personnages, un univers. Des ingrédients d’une simplicité déconcertante, mais dont la qualité tient à des paramètres ô combien fragiles.

Tout MMORPG qu’il soit, FFXIV a été bâti depuis le début sur l’épaisseur de son monde, dont la mythologie, la toponymie, la démographie, la culture, l’économie et la géopolitique ont été au tout départ principalement établis par Ken’ichi Iwao (précédemment planificateur dans l’équipe de FFXI). Preuve de l’importance accordée à cette démarche, elle a eu lieu avant même que la scénariste en chef de la version 1.0, Yaeko Satô, ne prenne la plume. Cette attention à la crédibilité de l’arrière-plan ne s’est jamais démentie depuis, au point de faire de l’univers du quatorzième épisode – n’ayons pas peur des mots – le plus riche de la série.

Cette tâche cruciale de création de l’univers a été transmise à Banri Oda au moment d’A Realm Reborn, avec Kazutoyo Maehiro à la direction du scénario. Puis, à partir de Stormblood, les deux données se sont trouvées réunies quand Oda est devenu lui-même scénariste en chef, en duo avec Natsuko Ishikawa. Grâce à leur travail commun et à celui de leur équipe, l’histoire du jeu a peu à peu atteint son summum. Contexte et récit ne font plus qu’un, offrant à tout joueur de FFXIV un voyage impressionnant, aussi authentique qu’il est envoûtant. Et comme chaque nouvelle extension possède sa propre saveur, l’aventure est régulièrement renouvelée au fil des années.

À la recherche d’une forme cohérente

Le temps, étonnamment, est l’un des atouts de FFXIV, et sa principale bénéficiaire n’est autre que son histoire. Alors que la série Final Fantasy nous a pendant longtemps habitués à des titres uniques, dont le récit raconté en une seule fois se suffit à lui-même, l’irruption des suites directes à partir de Final Fantasy X-2 a permis aux créateurs de prolonger leurs aventures. Or, les formules choisies n’ont que rarement été pleinement satisfaisantes pour garantir une continuité élégante des projets. Suites forcées ou improvisées, parfois confiées à des équipes différentes, contraintes par le temps et le budget à des cadres réduits, ou dispersées sur d’autres formats (romans, films, CD « dramas », etc.)… Les exemples ne manquent pas et ne se limitent d’ailleurs pas à FF, certaines sagas incarnant mieux encore les constructions absconses et indigestes.

Zanasea Gansy 12/07/2017 22:11:33

Finalement, comme l’avait déjà démontré le précurseur FFXI, le genre MMORPG se prête le plus volontiers à une telle trame continue, par le simple fait que sa forme reste la même. Plus qu’un jeu et ses suites ou titres dérivés, on peut le voir comme une entité vivante, où la base de départ est enrichie à intervalle régulier. L’œuvre conserve ainsi un fort degré de cohérence, résolvant de fait le problème de l’éparpillement. Ce constat est une curieuse ironie, quand on repense au dépit provoqué par l’annonce à l’E3 2009 de ce second Final Fantasy « online ». Même si un petit incident s’est entre-temps glissé dans les rouages, c’est pourtant bien grâce à ce choix qu’existe aujourd’hui l’un des épisodes les plus fascinants de la série.

Cette cohérence généreuse passe également par un mode d’expression en apparence rétrograde – mais en apparence seulement. En effet, même s’il compte un certain nombre de scènes doublées, FFXIV est indéniablement un jeu de l’écrit ; c’est-à-dire qu’il communique principalement son message par du texte à lire, et non à écouter. Simple retour au format des épisodes de la série avant le dixième, dites-vous ? Non, mieux encore. De l’épopée principale aux intrigues secondaires en passant par la somme des quêtes mineures, les scénaristes n’ont guère ressenti le besoin de faire l’économie des mots : tout est sujet à raconter des histoires édifiantes ou pittoresques, par lesquelles l’univers prend vie.

Ils n’ont pas non plus hésité à donner à leur écriture une forme de théâtralité qui rend la narration plus lente et parfois bavarde, certes, mais aussi plus posée et intelligente. Un héritage évident de FFXII, épisode qui avait déjà démontré que l’usage de la voix n’interdisait pas la préciosité du langage. Alors que la modernité voudrait du doublage en toutes circonstances et une mise en scène ultradynamique pour favoriser l’immersion, FFXIV incarne la revanche du dialogue écrit.

L’épaisseur de l’univers déjà mentionnée – ce que les anglophones appellent le lore – est une autre résultante de cette démarche. Prenant la forme d’un savoir sous-jacent qui donne une justification à chaque élément du jeu, elle est la garante de la cohésion avec laquelle est bâti son environnement géographique et culturel. Loin d’être réservées aux arcanes du développement, ces connaissances émergent à de nombreuses reprises au cours de l’histoire, dans le récit comme dans la conception artistique, pour la simple et bonne raison que la découverte du monde y occupe une part essentielle. Et quel délice, lorsque s’ouvrent les portes d’une nouvelle extension, de partir explorer ces lieux que l’on ne connaissait jusque-là que de nom, avec tout ce que cela implique de plaisirs visuels et musicaux ! Difficile, dans de telles conditions, de ne pas se sentir l’âme d’un aventurier.

Une odyssée de longue haleine

Final Fantasy XIV est aussi fascinant parce qu’il a réussi à intérioriser son propre naufrage. Rares sont aujourd’hui les joueurs qui peuvent se prétendre témoins oculaires de la version 1.0. Pourtant, tous ont connaissance de ce traumatisme fondateur qui a contraint les développeurs à avorter leur première expérience infructueuse. Inscrit dans la fiction d’Éorzéa sous la forme d’une catastrophe que nul n’a pu éviter – la chute de la lune Dalamud et la libération de Bahamut –, son souvenir est ainsi distillé au fil de la refonte et de ses extensions, et rappelé chaque année lors de la Fête de la Célébration. Il sert d’avertissement bien concret pour les héros comme pour les joueurs : le pire a déjà eu lieu et rien n’empêche qu’il se reproduise. Quel meilleur moteur pour une nouvelle histoire ?

Zanasea Gansy 20/01/2022 21:14:50

Cependant, l’épopée de la version 2.0 elle-même, A Realm Reborn, est peu comparable aux sommets plus tard atteints par les extensions. Comme une main tendue aux novices en matière de MMORPG, les développeurs y font le choix d’une habituation très progressive du joueur, centrée sur la découverte du monde d’Éorzéa et la lente accession de son avatar au statut de Guerrier ou Guerrière de la Lumière. Ainsi, si cette renaissance est admirable en de nombreux points, elle n’en reste pas moins coupable de débuts verbeux, d’une géopolitique encore simpliste et de clins d’œil faciles aux fans des anciens Final Fantasy – ces derniers étant un moyen rapide et efficace de rassurer une communauté en proie au doute.

Bien sûr, il serait malhonnête de juger le travail de reconstruction intégrale de FFXIV sans relever les circonstances particulières de sa survenue. Naoki Yoshida ayant insisté pour que les paramètres techniques soient consolidés en priorité afin d’éviter toute tergiversation lors de la phase de production intensive, l’écriture et l’intégration du scénario ont commencé tardivement dans le processus et ont dû s’accommoder du tracé global établi au préalable. L’essentiel d’abord ; les audaces viendront plus tard.

De fait : une fois la confiance prise et le rythme de croisière trouvé, quelque chose change dans la première extension : Heavensward. Désormais, l’épopée sera la chronique d’un grand voyage vers l’inconnu, autant géographique qu’historique. Récit édifiant d’une guerre lasse dont les raisons se perdent dans la nuit des temps, Heavensward s’affranchit de l’héroïsme uniforme au profit d’une intrigue plus pesante, pour ne pas dire tragique. Un bien étrange paradoxe pour une extension qui donne au joueur la clé des cieux… Ainsi, malgré la somptuosité aérienne des nouveaux décors, elle narre avant tout les pérégrinations incertaines d’un groupe de compagnons forts, mais aux personnalités opposées, brouillant la frontière entre alliés et ennemis. Contrainte par les circonstances, l’improbable alliance entre le joueur, Alphinaud, Isayle et Estinien laisse longuement planer l’ambiguïté quant au dénouement du conflit.

Après les nuances de bleu et de gris de Heavensward, la morosité vole en éclat dans Stormblood, dont le périple enivrant vers un Extrême-Orient de fantasy permet de révéler la richesse de ce monde bien au-delà de la simple région d’Éorzéa. Mais cette nouvelle étape est surtout traversée par un souffle épique grandiose, dans le double conflit que mènent les peuples opprimés d’Ala Mhigo et de Doma contre l’empire de Garlemald. Si le scénario est moins tourmenté que celui des autres extensions, il n’en reste pas moins porté par des personnages débordant de charisme, y compris – et l’on reconnaît bien là un Final Fantasy – dans le camp ennemi. Quant à la dernière image de Stormblood, impression de son logo alors que résonne le chant maladroit mais sincère du peuple, elle est encore aujourd’hui l’une des plus émouvantes de l’histoire de FFXIV.

Puis vint Shadowbringers. Dans ce monde parallèle en perdition, les thématiques sont plus sombres que jamais et les créateurs ne reculent pas devant les scènes proprement choquantes. C’est que, comme une répétition générale d’Endwalker, le sujet de la fin du monde est d’ores et déjà omniprésent, autant dans ses manifestations horribles que dans les agissements de ceux qui sont prêts à tout pour se réserver une place au paradis. Et au beau milieu de ce chaos s’ébat Emet-Selch, grand méchant parfaitement ambigu, aussi inquiétant qu’il est fascinant. La porte ouverte par Heavensward aboutit ici : ni bien, ni mal, mais le choc des idéaux, la recherche de sa propre préservation et, en définitive, la lutte de chacun contre l’oubli. Face aux incertitudes du déluge de lumière qui menace cette terre, l’union indéfectible des Héritiers de la Septième Aube exilés contre leur gré est un superbe symbole de ténacité.

Les bénéfices de la longue durée

Car tel est le message porté par FFXIV, grande fable sur les vertus de la détermination et d’une certaine forme d’abnégation pour pacifier un monde en proie à de nombreuses menaces. Cette noble mission se fait au prix d’intenses efforts diplomatiques, qui butent naturellement sur la nécessité pour un MMORPG de proposer des combats – la violence étant l’ultime recours bien pratique pour insuffler de la tension. Mais pas question de voir dans l’aspiration à la paix entre les peuples un bon sentiment naïf, car comme Endwalker le souligne tout particulièrement, l’aide désintéressée n’est pas toujours perçue comme telle. Et ne parlez pas à ce pauvre Alphinaud des Braves du Cristal… En retour, ces incidents nous apprennent que s’il y a des bas, il y a aussi des hauts, et qu’on mérite bien de se battre pour les moments de paix, si éphémères soient-ils.

Cet éloge de l’entêtement à surmonter les pires obstacles ne vient pas de nulle part. Ici aussi, il est impossible de ne pas lier la fiction de FFXIV à son histoire réelle, et s’il y a bien un jeu vidéo qui peut légitimement parler de résilience, c’est lui. Grâce à la démonstration d’humilité et à la sincérité de ses créateurs, il est parvenu à se sortir de cette mauvaise passe. Des années après la résolution du désastre, cette mentalité demeure très présente dans la communication publique, sous la forme d’un authentique plaisir de partager. Cela n’est sans doute pas étranger au climat de bienveillance qui entoure FFXIV, produit d’une construction de longue haleine et résultat d’une personnalisation du projet derrière ses figures importantes – Naoki Yoshida, bien sûr, mais aussi le compositeur Masayoshi Soken, les scénaristes déjà cités et bien d’autres.

Zanasea Gansy 26/05/2021 22:07:05

Aussi, ce long voyage n’est pas qu’une aventure ponctuelle : pour qui a eu le plaisir de le faire au fil des années, l’épopée du Guerrier ou de la Guerrière de la Lumière fait un peu partie de sa vie, et les Héritiers sont comme des amis que l’on prend plaisir à retrouver régulièrement. Ainsi, les grands moments ont le temps de se changer en doux souvenirs et nous pouvons envisager avec impatience le prochain rendez-vous… sans pour autant être des bêtes captives. Car, en ces temps de jeux-services qui ensevelissent leur public sous les sollicitations, FFXIV sait respecter le temps de ses joueurs s’ils souhaitent goûter à leur rythme au strict minimum, c’est-à-dire l’histoire principale, sans se consacrer pleinement aux activités de haut niveau.

En cela, le jeu se savoure comme un épisode hors ligne, tout en jouissant de l’ajout progressif de nouveaux chapitres – les avantages des deux formules, somme toute. C’est parce que nous avons eu tout le temps de nous attacher à ces personnages et à cet univers que le grand final entrepris par Endwalker était en mesure d’être un pareil apogée… et que les créateurs ont pris la liberté de mener son intrigue à l’échelle cosmique.

Ensemble jusqu’aux confins

Shadowbringers avait placé la barre si haut que, pour espérer ajouter une nouvelle pièce concluant dignement cette première épopée dans Endwalker, l’équipe de développement a dû se surpasser – au point de lutter sans doute contre sa propre forme d’apocalypse. Afin de répondre à ce défi, elle n’a pas eu besoin de chercher bien loin : il lui suffisait d’appliquer la recette du succès qui était déjà entre ses mains, et nous autres joueurs n’en attendions pas moins. Une fois encore, la dénomination de « MMORPG » n’a plus vraiment de pertinence. L’espace d’un nouveau chapitre, nous sommes simplement devant Final Fantasy à son sommet : une histoire puissante, au rythme soutenu, aux thématiques fortes, aux héros marquants et aux scènes inoubliables.

Pour espérer sidérer son auditoire, Endwalker ne se contente pas de proposer une fin du monde proprement glaçante doublée d’une surprenante excursion lunaire. Non, il s’empare avant tout, et le plus fièrement du monde, de la question la plus tarte à la crème qui soit : quel est le sens de la vie ? Il est fort aisé de se casser les dents sur une telle interrogation, et il est également audacieux de la part d’un modeste joueur d’oser affirmer que le contrat a été rempli, que la réponse donnée a réellement touché une partie de soi-même. Mais, du haut de sa décennie d’existence, entre échec, résurrection et succès, par le long et édifiant périple qu’il propose et grâce au talent indéniable de ses créateurs, Final Fantasy XIV a toute la légitimité pour y répondre.

Il en résulte une fresque magnifique qui, libérée du temps et de l’espace, emprunte autant à l’astrophysique de pointe qu’aux réflexions philosophiques les plus fondamentales. Devons-nous rêver à un lointain passé édénique ou désespérer face à la finitude de l’univers ? Endwalker est impressionnant en cela qu’il réussit à mêler ces considérations vertigineuses à de douces tranches de vie, et ses scènes les plus fameuses sont peut-être aussi les plus simples – ne seraient-ce que les retrouvailles autour d’une bonne table. Ainsi, en réalité, la réponse à la question était sous nos yeux depuis le début : le sens de la vie, c’est le voyage en bonne compagnie.

Face aux épreuves et aux incertitudes, la boussole la plus sûre de tout Guerrier ou toute Guerrière de la Lumière reste les Héritiers de la Septième Aube, un groupe d’authentiques amis de fiction. Tataru, le pilier aux doigts de fée ; Krile, la magicienne avisée ; Thancred, l’intrépide au grand cœur ; Urianger, le cachottier ingénu ; Estinien, le solitaire repenti ; Y’shtola, la force tranquille ; G’raha Tia, l’esprit sage dans un corps juvénile ; Alisaie, la justicière au franc-parler ; et Alphinaud, le jeune prodige à l’âme pure… Il y a dans l’inflexible fidélité à leur cause quelque chose de profondément rassurant, sans pour autant sombrer dans la naïveté. La bataille a fait des victimes que tous se refusent à oublier, mais les victoires qui jalonnent leur parcours justifient cette persévérance.

Comment ne pas saluer également cette extension pour la place admirable qu’elle accorde à la musique dans sa recherche symbolique ? Outre la partition une nouvelle fois inspirée de Masayoshi Soken et de ses collègues, il paraît inimaginable que, plus de dix ans après son écriture par Yaeko Satô, le texte de la chanson « Answers » ait pu nourrir la création du personnage de Venat avec pareille justesse. C’est un peu comme si ces paroles avaient observé les joueurs pendant tout ce temps en attendant de révéler leur sens profond, bien caché dans cette sentence : « Thou must live, die and know » (tu dois vivre, mourir, et alors tu sauras). Et que dire de ce nouveau thème en guise de réponse, « Flow », débordant de l’amour d’une planète pour ses enfants qui ont vécu et qui désormais savent ? Et de cette « Close in the Distance », espoir projeté à travers l’univers ? Il y a, décidément, des émotions que seule la musique sait décrire.

Généreux, cohérent et fidèle à ses principes, Endwalker est une récompense merveilleuse pour tous. Pour les développeurs, qui ont su mener FFXIV de la catastrophe jusqu’à la consécration et qui méritent amplement ce succès. Pour les joueurs, qui ont toujours porte ouverte sur un monde virtuel immense, chaleureux et passionnant. Et pour les fans de Final Fantasy, qui en cette année de 35e anniversaire trouvent là une raison implacable de continuer à admirer une série dont on peut dire qu’elle n’a pas toujours été dans sa plus grande forme.

Il y a d’ailleurs quelqu’un qui ne s’y est pas trompé. Poussé à s’y essayer en amont de sa discussion avec Naoki Yoshida, en octobre dernier, Hironobu Sakaguchi a été littéralement happé par Final Fantasy XIV, au point d’en dévorer l’épopée en quelques semaines seulement (son compte Twitter en est désormais rempli) et de découvrir Endwalker en même temps que le reste de la communauté – un simple Guerrier de la Lumière parmi tant d’autres. Tous ensemble, pour la beauté du voyage.

Et le plus beau, dans cette histoire, c’est qu’il n’est pas fini.