Éditorial : l’adieu à une inconnue

stella

« Je dois m’en aller. Ne vous souciez pas de moi. Vivez comme vous l’entendez. » Ce seront donc les derniers mots de Stella, prémonitoires, entendus en 2013 dans la première bande-annonce de Final Fantasy XV. La jeune femme ne savait sans doute pas qu’elle nous faisait là ses adieux, car cette vidéo était en réalité rapiécée à partir des cinématiques de l’ancien Final Fantasy Versus XIII et des graphismes du premier prototype du jeu devenu numéroté, mais encore à ses balbutiements. Après une attente certainement trop longue, Hajime Tabata s’est finalement décidé jeudi à révéler que le personnage n’a pas été retenu dans le scénario actuel, au même titre qu’une séquence pourtant précédemment dévoilée à l’époque de Versus XIII. Le message est alors clair : FFXV vole de ses propres ailes.

Est-ce vraiment une surprise ? Non, tant depuis qu’il a succédé à Tetsuya Nomura, Tabata a déjà dû plusieurs fois se justifier de certains choix revenant sur les promesses de son prédécesseur, et tenter de rassurer les joueurs inquiets. Sans renier l’idée de fantasy basée sur la réalité et l’univers imaginé par le célèbre designer, il a d’ailleurs mobilisé une équipe qui a depuis fait montre de tout son enthousiasme et tout son talent pour donner enfin naissance au jeu. Et cela passe nécessairement par une série de concessions : un jour, les grandes et séduisantes idées doivent bien se concrétiser. Ce sont eux qui détiennent les clés de ce que Final Fantasy Versus XIII voulait être. Nous, qu’en avons-nous su ? Pas grand-chose finalement. Et de la regrettée Stella ? Encore moins. Difficile de pleurer la disparition d’un personnage resté une quasi inconnue, et plus difficile encore de la comparer déjà avec Luna, sa vraie-fausse remplaçante dont on ne connaît rien pour l’instant.

luna

Tous les jeux en gestation vivent et changent, et ce habituellement dans l’ombre. Ici, notre seul malheur est d’avoir été les témoins de ces neuf années de production. Jusqu’au bout cela sera le fardeau porté par Final Fantasy XV et Square Enix a peut-être eu tort d’insister. Pendant tout ce temps, l’imagination a beaucoup mouliné, et c’est normal : Versus est apparu sous la forme élégante d’une fantasy moderne et nocturne. Aujourd’hui, c’est à Hajime Tabata et son équipe qu’il revient d’en tirer un jeu concret, alors les rêves cèdent évidemment la place à la réalité. Mais tout ce que nous avons connu de Versus n’a jamais été que les fragments souvent mystérieux d’un titre en production, qui allait forcément montrer bien plus qu’une métropole de nuit. Tout comme la verdure de l’Episode Duscae n’est que le fragment d’un FFXV loin d’avoir montré toutes ses formes.

À Square Enix de nous prouver que FFXV mérite encore d’exister, et à nous aussi de ne pas trop nous languir de ce passé pénible. Car en définitive, le plus absurde serait que, le jour où Final Fantasy XV arrivera enfin, on lui reproche de ne pas avoir réussi à égaler un jeu dont nous ignorions tant.